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Phantasma Kai Aletheia
6 avril 2014

CR de Zéro virgule vingt-cinq Marathon de Paris

Dimanche 6 avril :  Marathon Day.

Je mate le début du marathon à la télé, constate avec bonheur que Bekele talonne tout 2h05'04 finisher qu'il soit, me change puis décolle pour Passy, la station de métro du kilomètre 30. J'arrive facilement sur les bords de la route, un mètre après l'arche "30km", à l'endroit du rendez-vous fixé avec David.

Et là, c'est comme enfreindre la loi sur le Tour de France. Lâcher la main de sa mère et traverser la route à 4 ans et demi. Désobéir. Ou faire irruption dans un rêve : tu es sur le bord de la route, agglutiné avec la masse des supporters mère-père-fille-tata-tonton-fiston; ça braille, ça brandit des drapeaux, ça mange du kebab-frites et toi, au milieu de ça, l'air de rien, un sourire bêta (oui béat ça marchait aussi mais là je vous jure il était bêta) sur le visage, tu mates les coureurs en prenant ton pied et en sachant pertinemment ce que tu t'apprêtes à faire...Et tout à coup, le pote arrive. Tape dans la main, c'est parti, tu cours. Tu prends le train en marche. Tu te retrouves dans le flux. Tu rejoins avec fierté le banc de saumons nerveux qui remonte la rivière.

Bon, un peu fatigués les saumons au kilomètre 30. Des rictus tous différents déforment les visages tous différents des runners-runneuses. Rouges, suants, livides, émaciés. Une ribambelle de morphologies de toutes sortes, de tous volumes et de tous âges déambule, joue des hanches et des quadriceps sur le bitume de l'avenue Kennedy.

David souffre des articulations et des muscles depuis le kilomètre 25. Autant dire que les 12km restant s'annoncent fastidieux. Ils le furent ! Mais du même coup, héroiques, n'ayons pas peur des mots. Fraîche, à côté de lui, je sais pertinemment ce qu'il peut ressentir. Il suffit de se souvenir de mes deuxièmes moitiés de marathons : des courbatures, des courbatures, des courbatures. Le corps raidi, le mental à plat, l'énergie épuisée...

On alterne marche rapide, course, marche rapide. Au km 33, par là, David, adepte du barefoot running, enlève ses pompes. Il fera les 9 km restant pieds nus, s'attirant les remarques de nombreux coureurs. C'est marrant à observer d'ailleurs. "Oh le pauvre"...."Oh maman regarde le pauvre..." (la mère) "ça doit être parce qu'il a mal aux pieds....". De nombreux runners lui donnent l'accolade et l'encouragent. J'imagine que ça lui fait du bien (quoi qu'il en a peut-être marre aussi à force?). De temps en temps, il s'arrête brièvement pour s'étirer, ou pour chantonner J'aime regarder les filles qui marchent sur la plage (sic). Subitement, vers le km 36 (si mes souvenirs sont bons), il s'agace : Rrrrrraa putain mais qu'est-ce que tu fous bordel !!!!* et pique une putain de pointe de vitesse, passant de 7.5kmh à 11kmh en quelques mètres.

*ce ne sont pas ses mots exacts mais nous pensons avoir effectué une reproduction à peu près fidèle (NDT)

Je suis sciée, autant par la soudaineté du truc que par la rapidité de l'allure atteinte. Ok le David, il marche à la colère et à l'orgueil ? On va tenter de l'énerver un peu alors...

Seulement parfois, c'est le corps qui dicte sa loi. Quand il est perclus de courbatures, il est perclus de courbatures. Tu auras beau lui donner des coups de fouet d'orgueil, des injections de motivation ( petite sélection aperçue sur la route : jolis culs de fille hyper sexys, distribution de blanc alsacien par le marathon de je-n'ai-pas-retenu-où-en-Alsace, pancartes "Pensée Positive" brandies à destination des runners, danseuses tahitiennes se trémoussant à demi nues, fanfares, reprises de U2 par des quinquagénaires à chemise en soie imprimée et j'en passe), parfois le corps, il ne peut juste plus.

Tant bien que mal nous sortons du bois de Boulogne (au passage, superbes ces 12 derniers km du parcours, parmi les arbres, très beau panorama) et atteignons le km 40. Ca se précise, on dirait. Et, en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, on arrive au km 41. Là, franchement, ya de quoi fanfaronner. Sérieusement. 1 kilomètre 2, c'est quoi? 1200 mètres...3 tours de piste. Je gueule partout "3 tours de piste, 3 tours de piste" comme une forcenée, me prenant pour un GO au club med rayon fitness. Certains me regardent l'air vaguement hébété. Je continue quand même. 2 tours de piste et demi ! 

Il est à noter que sur David, ça a l'air de fonctionner. Le dernier km et demi sera fait sans aucune marche, tout en courant, et avec un regain d''énergie même.

La distance fond comme peau de chagrin...Nous arrivons à Porte Dauphine, un rond-point et hop, sans transition, les 800 derniers mètres...et une gamine qui escalade une barrière en criant Papa. Mon pote, qui ne savait pas à quel endroit - ni même si - sa famille parviendrait à venir l'encourager parmi cette foule, a dû sentir son coeur sauter 15 fois dans sa poitrine. Enfin j'imagine... La gamine lui tient la main, nous voilà 3 bonhommes courant vers l'arrivée qui nous tend les bras.(mon sens de la métaphore s'émousse à mesure que les kilomètres défilent, je constate). Je booste David une dernière fois pour une dernière accélération et tenter de finir sous la barre des 5 heures; on se donne la main tous les trois, la gamine à gauche, moi à droite, on harponne les photographes en se disant qu'on doit être putain de photogéniques quand même et qu'ils peuvent décemment pas louper ça, et on franchit la ligne. On franchit la ligne. Ca dure une fraction de seconde. End. Fin du calvaire. Enfin, pour moi, de l'aventure. 

Expérience très chouette. J'ai réussi à transformer ma frustration de ne pouvoir courir ce marathon pour cause de blessure, en autre chose. Autre chose qui me guérit provisoirement de la course au chrono et au résultat et aux kilomètres. Juste être là, pas être forcément très utile à jongler entre le "tu vas y arriver"/"bouge tes fesses"/"fais comme tu sens si tu as besoin de faire une pause", mais juste je sais pas, faire un truc pour autre chose que pour ma gueule.

A réitérer !

Bon maintenant je vous dis pas comment j'ai la dalle de courir mon prochain marathon, hein.

Faut pas déconner non plus.

20369696

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Commentaires
C
Bravo à vous 3. Dis ? Il est normand ton pote ?
R
Pour le coup tu as même fait deux marathons! Un premier dans ton canap avec king Bekele et un deuxième épique de supportrice de l'extrème!<br /> <br /> Alors un seul marathon la prochaine fois ça devrait passer tout seul! ;)
R
Super! Plaisir d'être de la fete... Tu vas en faire cette annee je te le dis ! Et en Alsace, c'est a Molsheim mi-juin, le MVA, le plus gros RdV de CourirLeMonde de l'histoire, delires et rires garantis. Viens !! Tu te regaleras comme nous tous, deguisés pire qu'au Medoc , objectif 5:59 ;-)
R
Zéro virgule vingt-cinq...<br /> <br /> mais c'était le quart le plus important de l'épreuve.
F
Génial!! Toi, ca te fait une sorte de teaser pour ton prochain marathon et David, ca a du le booster a mort!!<br /> <br /> C'est top!!!<br /> <br /> Bravo a vous deux!!!
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